Parution du numéro 6 de la revue Savoir/agir
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Mai-Juin 68 : la rencontre ouvriers/étudiants
Quarante ans plus tard, on a semblé découvrir que Mai-Juin 68 en France, ce n’était pas encore la libération sexuelle, les communautés et le cannabis (« la contre-culture » c’était ailleurs, en France, ce fut plus tard), que ce n’était pas seulement les étudiants, la Sorbonne, les barricades et Cohn-Bendit, mais que ce fut aussi et surtout le plus grand mouvement de grève du xxE siècle et, de ce fait, une remise en cause généralisée de l’ordre établi : jusque dans le champ politique qui sembla vaciller pendant un temps1. Sans cette grève générale, on ne commémorerait sans doute pas plus aujourd’hui Mai-Juin 68 que Novembre-Décembre 86 : qui se souvient encore de la mobilisation étudiante contre la réforme Devaquet ?
Que s’est-il passé en Mai-Juin 68 ? Simplifions : la répression policière des manifestations étudiantes du 3 au 12 mai suscite la solidarité. La grève de 24 heures et la grande manifestation intersyndicale du 13 mai sont relayées dès le lendemain : grèves et occupations d’usines se multiplient jusqu’à atteindre, dès le 20 mai, 7 à 8 millions de grévistes. Le 10 juin, on compte encore près d’un million de grévistes. Reste que la « Révolution » que beaucoup espéraient et que beaucoup d’autres redoutaient n’a pas eu lieu : dans ce « moment critique », certains crurent voir une « répétition générale », tous les autres s’employèrent à en conjurer le spectre.
Si « la Révolution » n’a pas eu lieu, cette situation exceptionnelle eut de multiples effets. Ce dossier est consacré au « décloisonnement social » plus souvent supposé qu’étudié et, plus spécifiquement, aux rapports entre ouvriers et étudiants. Sans sacrifier à une vision euphorique de l’abolition des frontières sociales, on interrogera ici, sous différents angles, « cette rencontre improbable ».
Sommaire
Éditorial
Changements systémiques ?, par Frédéric Lebaron
Dossier
Mai-Juin 68, « jonction » ou rendez-vous manqué » entre ouvriers et étudiants, entretien avec Bernard Pudal.
Les anathèmes gauchistes contre le PCF et la CGT, par Henri Rey.
Les disqualifications des gauchistes au sein du PCF. Enjeux sociologiques et stratégiques, par Paul Boulland, Nathalie Ethuin, Julian Mischi.
Unité ouvriers-étudiants : quelles pratiques derrière le mot d’ordre ? Retour sur Besançon en 1968, par Nicolas Hatzfeld et Cédric Lomba.
Rétablir les établis…, par Erik Neveu.
Des ouvriers au Quartier latin ?, par Gérard Mauger, Claude Poliak.
Marginalité, « bonne volonté culturelle » et « bohème populaire », par Gérard Mauger, Claude Poliak.
Le mouvement social britannique en 1968,par Keith Dixon
Grand entretien
Révoltes populaires et révoltes étudiantes au xixe siècle, avec Jean-Claude Caron.
Paroles
Lucien, 18 ans en mai 68, une figure de la « bohème populaire », par Claude Poliak
Rhétorique réactionnaire
Le modèle social français, par Frédéric Lebaron
Chronique de la gauche de la gauche
Recompositions à gauche de la gauche, par Louis Weber
Actualité
Du fichier Edvige aux sociétés de contrôle, par Gregory Salle.
Europe
Des arrêts de la CJCE contre l’Europe sociale, par Marc Mangenot.
Politiques d’ailleurs
L’affaire Chaudhry : le mouvement des robes noires pakistanaises de 2007-2008,par Laurent Gayer.
Rumeurs birmanes, par François Robinne
Culture
Marine Sonnet, Atelier 62, Le temps qu’il fait, 2008, par Gérard Mauger